Vedi Napoli e poi muori
L’Ange tombé du ciel
Un jour, un ange de sexe inconnu tomba du ciel, frappé par la foudre, la pluie et la tempête, il était dans un très mauvais état et ressemblait à une vieille poule déplumée, mouillée et crottée. Il n’avait plus que la peau sur les os, et un reste de rouge sur les lèvres de la vie.
Aussi les gens l’enfermèrent dans un poulailler avec les autres volatiles révoltés, caquetants de colère et de désapprobation.
Là, il croupissait tout trempé et malheureux, recroquevillé dans un coin, impénétrable et taciturne.
Il avait perdu beaucoup de plumes, on pouvait même entendre la jacasserie des ciseaux des mites qui réduisirent ses plumes en poussière, et ses grandes ailes décharnées étaient squelettiques. Il n’était plus qu’un spectre qui sentait la naphtaline.
Seule et unique curiosité, il portait des bas satinés avec des jarretières dorées aux mollets et savait jouer de l’accordéon pour faire danser les poules à l’occasion quand elles sanglotaient trop de nostalgie pensant à la « poule au pot » et voulaient danser entre elles un tango voluptueux.
Pudique, il se cachait dans son enclos à l’abri des regards, marmonnant des prières dans le noir, une plume de deuil derrière l’oreille, assis sur la cendre tassée de son cœur, avec une lueur hallucinée dans ses deux yeux un peu bridés, révélant la mansuétude d’un ange qui a traversé tous les cieux !
On ne savait que faire avec cet étrange ange hermétique (ou déchu), tombé du ciel ou d’un nuage de mystère; il refusait toute nourriture, maigrissant à l’œil et ne parlait pas, il faisait vraiment pitié à voir derrière les grilles rouillées avec les poules à l’œil exorbité et interrogateur, toutes effrayées !
Pour un ange c’était l’enfer…
Quand on décela sous son apparence croutée un peu de son ancienne grandeur, on lui dispensa tous les soins requis, le décrotta, le nettoya et le parfuma à l’eau de rose un peu, lui coupa les cheveux, lui fit boire un bol de bouillon de crêtes de coq et lui procura même un pot de chambre en or. Ensuite on lui laissa un moment de répit pour réfléchir posément afin qu’il pût sonder son âme sous sa dignité douloureuse.
Par contre, on ne l’affubla pas d’un masque, à cause de la Covi-démence-et- Clima-t-Escroquerie à la mode, de peur que les poules ne se moquassent de lui !
Quand même, un jour, une poule lui manqua de respect, l’ange redressa son auréole qui avait glissé sur l’oreille gauche, ajusta son monocle, et de son œil angélique mais torride la foudroya de son regard, la fixa, et la tint suspendue en l’air, anesthésiée; le volatile irrespectueux et terrorisé, ayant la chair de poule, pondu un œuf d’enfer tout noir.
L’ange avait de grands yeux verts gris souris avec une lueur étrange qui donnaient à son visage une phosphorescence spectrale, et portait une croix de cendre sur le front, contre le mauvais œil sûrement, le malocchio! On ignorait quels secrets recélait ce cœur indéchiffrable ! Pour ne plus être seul, il demanda des ciseaux et se découpa un autre ange dans du carton doré…
Mais ce n’était plus un ange d’albâtre, plutôt rachitique, un ange tombé en disgrâce ou peut-être (un) ange clandestin ou un ange gardien déserteur? Presque moribond, avec ses clavicules pointues, il croupissait dans son enclos d’oubli, respirant comme un chat en transe qui a avalé une souris de travers.
Un jour, vu son état de décrépitude, un médecin l’ausculta et lui découvrit un souffle au cœur… et lui prescrit du repos…
La suite de son rétablissement:
Pendant sa convalescence il se morfondait et fut d’une humeur irritable et très susceptible … alors, quand il entendait parler de lui, il enrageait… il sentit un torrent de sang bouillir dans ses veines, tellement il était furieux. Pour se calmer et oublier un gargouillis de scorpions dans ses entrailles, de rage, il prit un bain chaud, car il sentait un peu les plumes, s’aspergeant avec l’eau savonneuse du baquet, se savonna, s’épouilla copieusement en se regardant les fesses dans le miroir afin de mesurer la cruauté avec laquelle le temps les avait traitées depuis qu’il était arrivé sur terre, expulsé du ciel.
Ainsi il se refit une beauté comme il le put ; il avait cette peau translucide qui ressemblait à de la paraffine… étonné mais satisfait de ses courbes et de sa noble chute de reins, il se mit à somnoler, le nez dans la mousse…
Le miroir dans lequel il s’était miré, fut vendu plus tard, aux enchères, avec le souvenir du reflet des fesses de l’Ange, chez Christie’s où il atteignit un prix miroitant, bref, ce qu’on appelle une somme astronomique.
Ayant constaté que son corps était encore présentable et méritait d’être vu, et après s’être gratté le dos avec un grattoir à long manche dont l’extrémité était une petite main d’argent… il se mit une goutte de parfum capiteux de fleurs d’orangers derrière l’oreille et sous les ailes… dont il effila les pointes blanches avec de la gomina qui exhalait une vapeur magique. Ainsi coquettement parfumé et irrésistible, il décida, le lendemain, d’aller voir une voyante pour se faire lire son destin et avenir précis dans les plis de ses ailes.
Avec cette ultime pensée, il s’alluma une cigarette qu’il fuma religieusement mais toujours en cachette parce qu’il était mal vu qu’un ange fumât sous les yeux épouvantés de Dieu.
Depuis qu’il s’était vu tout nu dans la grande glace d’ l’armoire s’ébrouant avec ses jolies ailes qu’il replia soigneusement, l’Ange pensait aussi se faire photographier, ce serait un portrait pour l’éternité ; ce qui le fit alors il hurler de rire.
À un moment, il avait même pris, pour se distraire, des leçons de peinture à l’huile, mais sans conviction car il pensait que ce n’était qu’une façon plus amusante de perdre son temps… à quoi bon de peindre des cœurs brisés, n’est-ce pas ?
Pourtant il était encore d’une humeur de chien, mâchouillant sa rage à cause du déshonneur d’avoir été expulsé du royaume de Dieu, et tout cela parce que, dans un état mélancolique et complètement désœuvré, il s’était fait violer par un succube invétéré, un démon femelle déguisé en ange aux appas irrésistibles, avec des grandes ailes tendres qui lui chatouillaient le nez et autres endroits sensibles et stratégiques.
De son sourire céleste…elle l’avait fixé avec effronterie et après l’avoir attrapé d’une main de rapace… elle le prit par la main comme un pauvre aveugle pour le conduire jusqu’au lit, et l’éplucha petit bout par petit bout avec une tendresse maligne, le sala à son goût, l’ailla, ajouta un oignon haché, le jus de citron, une feuille de laurier jusqu’à ce qu’il fût bien assaisonné et le four à bonne température.
Ensuite elle passa aux chatteries plus denses… et lui avait distribué ses trésors de voluptés jusqu’où son corps le lui avait permis. Sacrée femelle ailée qui pensait que vivre n’en valait pas la peine si ce n’était pour avoir un ange-mâle dans son lit de nuage! Elle lui avait chamboulé le cœur et avait emporté le trophée de sa virginité dans la première nuit de lune qui se tordait de rire, pendant que les étoiles brillaient immobiles et sereines.Devant ces ébattements amoureux, Dieu, compréhensif et plein de compassion, éteignit la lune… de miel.
En se déshabillant d’une main de fée, d’un seul geste magique, elle ôta sa jupe de taffetas brodé de perles, envoyant son corset à baleines par-dessus de son épaule… dégrafa son soutiens- gorge et ses fausses ailes, rapidement faisait glisser ses bas de soie funèbres, puis enleva sa petite culotte de dentelle noire … et, avec un éclat de rire triomphant, la voilà qui fut toute nue !
Pour attiser la libido de notre pauvre Ange encore innocent et le prévenir de ce qui l’attendait… elle lui avait montré des cartes postales porn-OH-si-graphiques incendiaires à se lécher les babines… qu’il ne connaissait point, qu’il contempla d’un œil torve avant de les déchirer aussitôt en mille morceaux mais que nul pouvoir divin ne pût lui ôter de la tête!
Pourtant même ses ailes ont failli prendre feu !
Mais le piège a réussi, il est tombé bien bas… directement dans les ailes grandes ouvertes de sa séductrice affamée et voluptueuse qui faisait des ravages parmi les anges mâles… craignant d’abord qu’il fût un peu frigide ou un pédéraste timide. Détrompée elle passa à l’action avec tous ses vices et espièglerie, car Elle devait sucer une tétine de bébé (elle en avait toute une collection) comme un petit veau de lait, pour avoir un orgasme, ce qui étonna fortement notre Ange. Elle n’était pas du trottoir mais un cadeau du ciel, pensa-t-il.
Elle lui apprit, en faisant l’amour, des nouveautés inconnues de lui, telles la position de « poulet à la broche » ou « l’ange écartelé » et d’autres délices réjouissants, entre des gestes de tendresse et des prises d’arts martiaux dont l’audace lui secoua les entrailles… Bref, elle a fini par le dépuceler et se blottir contre son épaule, satisfaite… Il comprit enfin pourquoi les coqs courent après les poules… il en fut heureux et s’imagina que ce fut lui qui avait troussé le succube et l’avait mise en état de grâce.
Se sentant renaître, il bomba fièrement son torse viril, fixant à nouveau d’un œil mâle le monde désormais à ses pieds et ailes. Heureux à jamais !
Lors de leurs distractions amoureuses, dans cette nuit d’urgence, avec cette pouliche vagabonde suffoquant dans la fièvre des délices crépusculaires, ils faillirent passer de vie à trépas lorsque le nuage de bonheur sur lequel ils flottèrent se dissipa soudain en- dessous d’eux.
L’Ange, maintenant mieux instruit de la vie amoureuse, fut tenté par toutes les jolies Angelettes débridées… alors Dieu qui pensait que l’Ange état devenu un bourreau des cœurs, commença à le surveiller et le regarder d’un œil sévère et lui traça une croix de cendre sur le front pour ne pas le perdre de vue!
Pour ne pas écorner sa bonne réputation, il demanda à l’Ange femelle de se déguiser en homme ; ainsi affublés ils avaient l’air des allures de noceurs noctambules pour éviter d’accueillir l’Ange femelle par la porte de derrière… mais restants toujours effrayés d’être reconnus.
Pourtant il y avait quelqu’un pour s’en rendre compte, ce fut Dieu qui les suivit de près sur leurs talons aiguilles… car il le soupçonna qu’il ne s’était pas marié à cause de ses mœurs spéciales, mais notre Ange n’écoutait jamais ces ragots… et ils allaient droit dans les nuages… afin de faire ce qu’ils devaient faire, quitte à être soupçonnés d’un mouvement débridé de Wokisme … et la réputation déjà bien ébranlée de l’Ange reçut alors son coup de grâce !
En retrouvant un moment de répit amoureux, l’Ange, des lors plus expérimenté, se mit à jongler avec des hypothèses… et réfléchissait sur le rapport entre le physique des Anges-femelles et leurs dons pour l’amour… il se méfait du type sensuel, de celles qui semblaient capables d’avaler tout cru un caïman mais étaient, au lit, les plus passives. Par contre les petites Angelettes pâlichonnes, qui semblaient se vider quand on les déshabillait et dont la maigreur faisait peine à voir, ainsi déplumées, mais qui, cependant, pouvaient laisser un ange gaillard le plus hâbleur ou même le diable, bon à jeter à la poubelle.
Notre Ange avait appris ce qu’il avait déjà plusieurs fois éprouvé sans le savoir : que l’on peut être amoureux de plusieurs Angelettes à la fois et avec la même douleur, sans en trahir aucune… Il se dit : « Le cœur possède plus de chambres qu’un hôtel de putes ! »
Alors il s’abandonna aux délices de rêver des apparitions angéliques comme une pauvre créature de Dieu que tourmentait le désordre de ses instincts et finit par boire un verre de l’eau-de-vie, jusqu’à rouler par terre, soûl comme une bourrique, le corbeau de la destinée posé sur son épaule…
Ceci fut sévèrement observé d’un œil céleste, et l’Ange se fit rabrouer méchamment par Dieu qui l’arrêta tout net, et avec sa sagesse de vieux chien, le sermonna que la seule chose qu’il fallait apprendre en amour : qu’on ne peut enseigner la vie, car rien en ce monde n’est plus difficile que l’amour !
Encouragé et de nouveau alerte et vigilant, il s’ébroua ses ailes, les replia avec soin, et après avoir pris sa collation de moineau… l’Ange eut une idée de génie…
Pour connaître la fin de cette folle mais rocambolesque histoire, il faut se rendre à Napoli, cette ville mystérieuse et envoûtante de tous les possibles et même impossibles !
………………………FIN………………………….
Vous devez être connecté pour poster un commentaire.